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De France 2 à «Motus» : Thierry Beccaro tire sa révérence après une trentaine d’années d’antenne


«J’ai cela en moi depuis longtemps. Il fallait passer à autre chose. […] Je quitte France Télévisions, où j’ai passé 35 ans. Mission accomplie. Il faut avoir le courage de dire ‘’merci, ça a été formidable’’.» C’est ainsi que Thierry Beccaro, célèbre animateur de France 2, connu principalement pour être à la tête du jeu «Motus», a annoncé, lors d’une interview partagée hier par le journal «Le parisien», qu’il voulait reprendre par lui-même sa liberté et se consacrer à d’autres projets. Retour sur la longue carrière d’un des plus célèbres animateurs du service public et de son annonce qui en a surpris plus d’un.




Un parcours riche pour un animateur discret


Pour bien saisir le retentissement qu’a l’annonce de Thierry Beccaro dans le monde des médias, il faut comprendre qu’il ne s’agit pas d’un animateur comme les autres. Thierry Beccaro arrive sur France 2, encore nommé Antenne 2 à l’époque, en 1987. Jusqu’alors, son expérience en télévision se limite à avoir été speakerine sur TF1 et l’une des voix-off des bandes-annonces de la chaîne. Sur la deux, il présente notamment «Matin bonheur», un magazine quotidien en matinée, jusqu’en 1990, puis «Samedi bonheur» de 1991 à 1993. De 1995 à 1997, il anime durant l’été «40° à l’ombre» sur France 3, tour des plages de France en direct l’après-midi.


Mais c’est en 1990 qu’il accepte d’animer le jeu qui le rend par la suite connu du grand public, «Motus». Le concept est simple : deux équipes de deux candidats s’affrontent en essayant de deviner des mots en un nombre de coups limité. Seule la première lettre du mot et le nombre de lettres qui le compose sont connus. Le mot proposé par les candidats doit être systématiquement épelé par ces derniers. Le mot apparaît alors dans une grille : les lettres bien placées sont écrites en rouge, tandis que les lettres présentes mais mal placées sont cerclées de jaune. Petit à petit, le jeu s’installe et devient une marque forte de la chaîne, bien que le jeu soit diffusé en fin de matinée, à un horaire où peu de personnes regarde la télé. En moyenne, le jeu réunit d’ailleurs environ 800 000 téléspectateurs, ce qui fait de France 2 le leader en terme d’audiences à cette heure. Le générique «mo-mo-motus», les bruitages et jingles, les boules noires, l’épellation des mots… ce qui fait l’identité du jeu est alors popularisé, devenant y compris parfois connus de ceux et celles qui suivent de loin le petit écran. Le jeu est aussi progressivement indissociable de son animateur, qui explique en grande partie le succès du jeu, étant particulièrement apprécié par le public majoritairement âgé de la chaîne et de l’émission, notamment pour la bonhomie, la bonne humeur et l’humour qui le caractérise.


En parallèle de «Motus», France 2 lui confie occasionnellement des émissions durant l’été ou en prime-time durant les années 2000-2010 mais ceux-ci sont essentiellement des «one shots». Thierry Beccaro se fait relativement discret dans la grille des programmes en dehors de cela, se contentant de son jeu quotidien. Depuis peu, il est le joker à la présentation de «Télématin», la matinale de France 2.

Un départ acté depuis bientôt un an


Bien que la décision de Thierry Beccaro de quitter «Motus» et France Télévisions, annoncée en mai et effectif dès fin août, apparaisse comme soudaine, elle semble pourtant être le fruit d’une mure réflexion. «Ce n’est pas facile comme décision. […] Il y a un an, à l’été 2018, j’ai senti que mon aventure avec France Télévisions arrivait à sa fin. ‘’Motus’’ marche toujours très bien. Mais je ne voulais pas devenir le vieux présentateur de ‘’Motus’’. […] A un moment donné, il faut faire attention à ne pas finir par se ressembler. Je sentais bien que je faisais souvent les mêmes blagues, qu’il était difficile après 29 ans de se renouveler. C’est important de partir avec une émission qui marche. […] En 1990, j’avais signé pour deux mois. Je ne pensais pas que ça durerait presque 30 ans.» explique t-il au «Parisien». Il insiste bien en tout cas sur le fait que la direction de France Télévisions n’est en aucun cas responsable de son départ, départ qui est le fruit d’une réflexion purement personnelle selon lui. Il salue au passage chaleureusement la direction du service public, dont il est reconnaissant qu’elle lui ait fait confiance pendant tout ce temps et avec qui il a toujours entretenu des rapports cordiaux.


Si Thierry Beccaro décide de tourner à présent la page de cette période de sa vie, c’est notamment pour se consacrer à de nouveaux projets, comme le théâtre, domaine dans lequel il exerce depuis les années 1990. Il se prépare d’ailleurs à partir en tournée en octobre prochain pour une nouvelle pièce de théâtre. «Elle s’appelle ‘’Faut que ça change’’. C’est un signe !» commente t-il en plaisantant. En dehors de cela, il ne semble pas encore avoir d’idées précises de ce qu’il a l’intention de faire. «Rien n’est fermé. J’aimerais bien jouer un rôle dans une fiction de France Télévisions.» dit-il. De plus, s’il quitte France Télévisions, il ne ferme pas pour autant la porte à un nouveau projet en télé à l’avenir. «Si on me propose quelque chose qui me rend heureux.» précise t-il.

Un avenir incertain pour le célèbre jeu de Thierry Beccaro


Avec le départ de Thierry Beccaro, une question se pose : que faire de «Motus» ? Spontanément, on imagine mal «Motus» se poursuivre sans son animateur emblématique. Pourtant, comme nous l’avons rappelé précédemment, le jeu a pratiquement 30 ans et constitue une marque forte de la chaîne. Pour l’heure, France 2 n’a pas encore fait d’annonce à ce propos mais plusieurs hypothèses semblent ainsi être envisageables.


Première possibilité : continuer le jeu avec un autre animateur. La transition a déjà été opéré entre Julien Lepers et Samuel Etienne pour «Question pour un champion» en 2016, ou encore entre Tex et Bruno Guillon pour «Les z’amours» en 2018. Dans les deux cas, la greffe a visiblement prise puisque les audiences des deux jeux se sont maintenues, voire même ont progressé.


Deuxième possibilité : remplacer le jeu au profit d’un autre jeu. Durant plusieurs semaines entre 2015 et 2016, d’abord en semaine puis seulement le samedi, un jeu intitulé «Un mot peut en cacher un autre» et présenté par Damien Thévenot avait ainsi été proposé par la chaîne en lieu et place de «Motus», avant que ce dernier ne revienne rapidement à l’antenne. On ne peut donc pas exclure le retour de ce jeu, ou à défaut l’installation d’un nouveau jeu à cette case, pour pouvoir conservait le public fédérer par «Motus» à cet horaire.


Troisième possibilité : arrêter purement et simplement le jeu. Si Thierry Beccaro explique dans son interview donné au «Parisien» que la direction de France Télévisions n’a pas cherché à le dissuader et à le retenir car «j’étais convaincu, et j’ai été convaincant», nul doute que cette annonce les a également arrangé. En effet, Thierry Beccaro fait partie de cette «télévision d’hommes blancs de plus de 50 ans» que Delphine Ernotte, dirigeante de France Télévisions, dénonçait et s’était engagée à y remédier au moment de son arrivée à la tête du groupe en 2015. De plus, la direction du service public a récemment fait part de sa volonté de supprimer des jeux, trop nombreux à leur sens sur les antennes du groupe, à la rentrée prochaine. Enfin, il ne faut pas oublier que le service public se voit imposer un plan drastique de réduction de budget pour les prochaines années. Ainsi, France 2 pourrait saisir cette occasion pour réduire un peu le coût de sa grille des programmes en se contentant de proposer des rediffusions à la place du célèbre jeu, comme ça avait été récemment suggéré à la place de «C’est au programme», magazine diffusé à la suite de la matinale de la deux.

Ainsi, c’est avec une certaine élégance, mais non sans tristesse, que Thierry Beccaro décide de tirer sa révérence, préférant partir de son propre chef à point nommé (chose suffisamment rare en télévision de nos jours pour être souligné) plutôt que de tirer sur la corde et d’attendre que «Motus» ne réalise plus des audiences satisfaisantes ou que la direction ne veuille plus de lui. On ne peut donc que lui souhaiter bonne chance pour ses nouvelles aventures, et, qui sait, peut-être bientôt télévisuelles.

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